Dans cet ouvrage, l’auteur interroge le secteur culturel sur les incohérences liées au fait de se soumettre aux lois du marché au risque de devenir « épiciers culturels ». Il alerte sur les écueils de la démocratisation de la culture et propose d’autres pistes de réflexion et de perspective politique sur la « volonté collective de déterminer les bonnes attitudes culturelles nécessaires pour construire un avenir commun à l’humanité durable ». Alors, la culture doit-elle contribuer au développement durable humain ou en être une condition ? Jean-Michel Lucas pousse son analyse jusqu’à proposer une nouvelle écriture de l’Agenda 21 de la culture qui assumerait des dispositifs de débats « libres, ouverts et documentés », en lien avec des dispositifs d’action publique notamment au niveau européen.
Avec l’approfondissement de la crise économique, la « culture » a changé de rôle : elle est devenue espoir d’un futur meilleur, au point d’être considérée comme le quatrième pilier du développement durable pour l’Agenda 21. Certes, sous le chapeau des industries culturelles et créatives, l’illusion semble parfaite puisque la culture génèrerait plus de 600 milliards d’euros et représenterait 14 millions d’emplois dans l’union européenne. Mais, face à ce constat, Jean-Michel Lucas pointe la perte de sens de ce nouveau rôle attribué au secteur culturel. Après avoir analysée la place qui lui est accordée dans les textes fondateurs du développent durable humain (de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement de Rio en 1992 jusqu’à l’Agenda 21 de la culture), il montre l’impasse dans laquelle se trouvent actuellement les professionnels de la culture qui n’ont plus qu’une position de « fournisseurs de services » et troquent leur public fidèle contre de bons clients. L’auteur s’emploie à démontrer qu’une autre perspective politique, ouverte initialement par Jon Hawkes, est nécessaire et possible ; elle prend acte des accords internationaux sur la diversité culturelle et affirme la primauté des enjeux de reconnaissance de la dignité des personnes dans leur identité culturelle toujours mouvante. La culture, dans l’esprit de la Déclaration de Fribourg sur les droits culturels, n’est plus un chiffre d’affaires de champions nationaux, mais une éthique, pour faire ensemble société, ou mieux encore, faire humanité commune et durable. L’auteur préconise de réécrire, en ce sens, l’Agenda 21 en estimant qu’il est vraiment temps d’organiser la palabre !
L’auteur, Jean Michel Lucas, universitaire, est engagé de longue date dans l’action culturelle et particulièrement la valorisation des musiques actuelles. Il a occupé des fonctions de responsabilité dans l’administration culturelle (Drac et conseiller de Jack Lang). Ses travaux de recherche portent sur la critique des politiques culturelles et, sous le pseudonyme du Doc Kasimir Bisou, il plaide pour la prise en compte des enjeux éthiques dans la conduite des politiques de la culture.