À la fin du XIXe siècle, dans toute l’Europe, les avant-gardes théâtrales font de la marionnette – jusqu’alors ancrée dans des traditions en déclin – un véritable modèle esthétique, qui persiste jusqu’à la fin des années trente. Ainsi, le sujet de ce livre n’est pas « le théâtre de marionnettes », défini par une série de pratiques qui volent alors en éclats, mais « la marionnette au théâtre » : comment et pourquoi cet objet théâtral entre-t-il dans le champ du « grand » théâtre, c’est-à-dire de la scène d’acteurs, et qu’y change-t-il ? Que devient la marionnette dans cette rencontre ? Ce « modèle marionnettique », profondément critique et expérimental, devient alors un laboratoire qui explore tous les champs de l’art du théâtre : théorie, dramaturgie, mise en scène. Cet ouvrage associe ces trois dimensions et analyse, dans trois pays où les conditions de la vie théâtrale sont assez différentes (la Belgique, l’Espagne et la France), à la fois des textes théoriques (manifestes, articles de presse), des réalisations scéniques et des textes dramatiques, en accordant une attention particulière au dernier aspect. De très nombreux textes dramatiques dits « pour marionnettes » ou inspirés par son esthétique y sont convoqués et soumis à une analyse dramaturgique approfondie qui explore la variété des possibilités dramatiques offertes par la marionnette au théâtre. On voit alors comment l’énergie polémique du modèle marionnettique explore, souvent avant l’heure, des territoires fondamentaux de la scène moderne : méta-théâtralité, parodie, distanciation, fusion des arts, mais aussi recherche d’un théâtre métaphysique, populaire et politique