La magie nouvelle

D’après l’article de Pascal Jacob dans « Magie Nouvelle : un art contemporain »,
dossier extrait du 
Stradda n°16 (avril 2010).

"Vibrations" de la Cie 14:20 - © Clément Debailleul

La magie nouvelle éclot en 2002, désireuse de libérer la discipline de ses limites formelles identifiées. En écho à la définition de la magie moderne posée par Robert-Houdin – « le magicien est un acteur qui joue le rôle de magicien », la magie nouvelle évoque « un art dont le langage est le détournement du réel dans le réel », appelé à puiser dans les différentes fonctions revêtues par la magie au fil de l’histoire, pour devenir une forme artistique autonome.

La magie nouvelle propose de renouer avec le sentiment magique. Son principe créateur apparaît de manière autonome, mais aussi dans la danse, le cirque, le théâtre…


Cinq mille ans d’enchantements

Quelques repères historiques pour décoder le cheminement jusqu’à la magie nouvelle

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] Le terme « magie »

Le terme de magie procède d’une ambiguïté initiale : pour le commun des mortels, le mot recèle une connotation symbolique liée au charme, à l’enchantement et au merveilleux.

C’est en 1535 qu’apparaît le terme de magie, forgé à partir du grec mageia, du latin magia et implicitement relié aux magi, caste de prêtres persans, adorateurs de Zoroastre*.
Un faisceau de pratiques magiques est alors identifié de façon générique.

* « prophète », fondateur du zoroastrisme. Zoroastre prêchait un dualisme apparent, qui reposait sur le combat entre le Bien et le Mal, la Lumière et les Ténèbres. L’esprit saint et l’esprit mauvais coexistent dans chacun des êtres vivants. Le zoroastrisme a fait fonction de religion officielle de l’empire perse à trois reprises.


L’Inquisition associera la magie à la sorcellerie, l’enfermant dans une vision infamante qui ne s’effacera qu’avec la disparition des tribunaux religieux au XVIe siècle en France, et en 1831 en Espagne. Les termes de prestidigitation et d’illusionnisme naissent conjointement à la disparition de l’Inquisition, et forgent le vocabulaire de la magie moderne.

À la même époque apparaissent les termes de médium, chamane, spirite : ces mots permettent alors de distinguer la magie feinte de la magie « réelle ».

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] Les premières traces

Les premières traces de magie, 3 000 ans avant notre ère, soulignent les liens étroits entre illusion et survie.

Les pratiques d’imitation qui permettent aux sociétés archaïques de cueilleurs et de chasseurs d’inciter les dieux à les pourvoir en gibier (techniques de piégeage, trappes recouvertes de feuilles, grottes à double-fond…) constituent les prémices d’une magie nécessaire.

C’est en imitant la nature et en jouant sur le décalage de la perception commune que les hommes ont forgé une magie créatrice et subordonnée au regard de l’autre.

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] La magie de divertissement

La magie de divertissement est attestée dès l’Egypte pharaonique.

Tour des gobelets

Le papyrus Westcar relate les exploits du magicien Dédi, attaché au service du pharaon Khéops qui règna vers –2550, suggérant l’intérêt porté par les puissants au développement de l’art magique.
Un joueur de gobelet sculpté sur un bas-relief d’un tombeau de Béni-Hassan (autour de -2500), souligne le lien au subterfuge et à la manipulation, éléments déterminants dans l’accomplissement du propos magique.

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] La magie de spectacle

La magie de spectacle apparaît dans la Grèce antique.

Le théâtre développe alors un répertoire où des trappes et des passages secrets, autorisant la réalisation d’effets spéciaux, s’avèrent indispensables pour la progression de l’intrigue.

Au VIe siècle avant notre ère apparaissent les premières voleries : un artifice spectaculaire qui permet aux acteurs qui incarnent les dieux d’occuper le ciel du théâtre et de se déplacer, comme par magie, dans les airs.

Les fonctions du Maître des secrets du mystère médiéval procèdent de la même source : il s’agit de transposer et transfigurer le réel sur de vastes plateaux, où anges et diables nécessitent des attentions différentes, mais suscitent la même fascination.

MYSTÈRE
Initialement orthographié mistère (du latin médiéval misterium, « cérémonie »), est un genre théâtral apparu au XVe siècle. Il se composait d’une succession de tableaux animés et dialogués écrits pour un public très large, mettant en œuvre des histoires et des légendes dont l’imagination et la croyance populaire s’étaient nourries. Le surnaturel et le réalisme s’y côtoyaient.

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] L’Inquisition

L’Inquisition, instaurée en France en 1234 par le pape Grégoire IX, va bloquer le développement des pratiques magiques pendant près de six siècles.

La condamnation de l’hérésie va s’étendre à tout phénomène considéré comme paranormal ou surnaturel et entraîner la raréfaction des magiciens dans tout l’Occident.

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] Dans le reste du monde

Dans le reste du monde, en revanche, d’autres pratiques de magie traditionnelle se révèlent à la curiosité des voyageurs.

En 1355, l’infatigable pèlerin géographe Ibn Battuta observe, et relate dans son « Journal de route », l’enchantement de la « corde hindoue », futur objet de fascination pour des générations de magiciens.

corde hindoue

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] En Europe, la magie moderne

En Europe, la magie moderne émerge au XIXe siècle en tant que savoir-faire d’illusion : un vocable renvoyant à la période des arts modernes, pour une discipline se nourrissant tant des progrès techniques que de l’attrait pour les sciences psychiques de l’époque.

Robert-Houdin

En 1845, le français Robert-Houdin, horloger et scientifique de génie, inaugure son Théâtre des soirées fantastiques. Vêtu d’une classique tenue de soirée, il préfigure un autre rapport à la magie, théâtral et élégant, mais surtout il délimite un espace où l’art magique peut désormais s’épanouir.

L’ouverture en 1873 en Angleterre, à l’initiative de John Nevil Maskelyne, de l’Egyptian Hall s’inscrit dans cette notion de foyers de rassemblement des praticiens d’une magie moderne destinée à devenir toujours plus spectaculaire.

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] Un répertoire

Un répertoire de gestes, de codes, de conventions régit la magie moderne.

Le close up, qui privilégie la manipulation de cartes, de pièces ou de cigarettes, est destiné à une toute petite assistance.

La magie de salon est pratiquée pour une centaine de spectateurs, le magicien utilise alors cordes, foulards, colombes et éventails de cartes…

La grande illusion, offerte sur la scène de plus grands théâtres, développe un répertoire basé sur l’utilisation de boîtes et de procédés scéniques spectaculaires.
La femme coupée en deux, ou la femme zig-zag, la malle des Indes et les multiples transformations où entrent en scène fauves et éléphants ont permis à quelques magiciens de devenir de véritables stars : Siegfried & Roy, David Copperfield ou Criss Angel émerveillent et fascinent des millions de spectateurs aux quatre coins du monde.

[wp-svg-icons icon= »star-3″ wrap= »b »] Effets magiques

Sept catégories d’effets jouent sur les grands fantasmes humains :

  • lévitation
  • apparition
  • disparition
  • transformation
  • téléportation
  • invulnérabilité
  • mentalisme

C’est à partir de ces propositions que les magiciens inventent sans cesse de nouveaux tours ou de nouvelles manières de les présenter.
La seconde vue, un exercice de divination  Suspension éthéréenne, une lévitation spectaculaire


Pour télécharger le dossier complet « Magie Nouvelle : un art contemporain » extrait du Stradda n°16 (avril 2010), cliquez ci-dessous

[wp-svg-icons icon= »download » wrap= »i »]Télécharger